Point de vue n° 010
Gourbeyre, Valkanaers, Rue Edouard Nègre (97113)
Mots clés
Unité paysagère
Terrasses du sud
Typologies spatiales
Reliefs et massifs forestiers, Espaces urbains
Thématiques
Dynamiques de l’interface périurbaine, Sites emblématiques et remarquables, Équipements et espaces publics, Zones d’activités économiques, touristiques et commerciales
Intentions photographiques
La zone de Valkanaers telle que perçue depuis une des rares fenêtres paysagères qu'offre les reliefs alentours.
(Sylvain DUFFARD, avril 2017)
Analyse paysagère
Un col entre Monts Caraïbes et mesa du Palmiste
La lecture, en parallèle du paysage photographié et de la carte IGN au 1/25 000e du lieu, donne à voir 3 entités géographiques :
• la forte pente du premier plan, inclinée vers le sud-ouest, qui forme le talus méridional du Plateau du Palmiste ;
• la zone de plaine étroite occupée par de nombreux et grands bâtiments commerciaux au milieu de l’image, c’est le secteur de Valkanaers ou col de Gourbeyre ;
• les mornes plus ou moins élevés qui barrent l’horizon, avec le Morne Boucanier à gauche et le Morne Cadet à droite derrière le grand arbre.
Cette configuration topographique unique dans le sud Basse-Terre s’explique par la présence d’un grosse coulée de lave âgée de – 67 000 ans, issue du Morne Graine Verte et formant la mesa du Palmiste, venue buter contre l’édifice volcanique des Monts Caraïbes vieux de 500 000 ans (cf. carte). Entre les deux, une étroite bande de terrain est verrouillée à l’est par le Morne Boucanier et à l’ouest par les éboulis (gros blocs de lave) issus du front de coulée sur lequel a été positionné le point de vue. Ce secteur déprimé a probablement été occupé par un étang d’altitude comme en témoigne les accumulations de sédiments argileux et de tourbe recoupés par les sondages effectués dans le secteur de Dos d’Âne. Progressivement comblé par les apports érosifs puis par ceux des humains, il reste cependant difficilement urbanisable.
Nous retiendrons toutefois que la configuration géomorphologique ainsi mise en place a permis la création au XIXe siècle du seul passage « carrossable », sans travaux gigantesques, entre la Côte au Vent et la Côte sous le Vent au travers de la chaîne volcanique de la Basse-Terre.
Luc LEGENDRE
retraité et expert en géologie et géomorphologie
décembre 2019
Distinguer l’en-vert de l’endroit
La composition de cette fenêtre visuelle sur le col de Valkanaërs, depuis les contreforts du Plateau Palmiste, a bien changé entre mars 2017 et juillet 2018. Au moins 3 raisons à cela, toutes liées à la végétation :
• La saison de prise de vue rythme le cycle de végétation et entraîne la chute des feuilles des arbres caducs pendant le carême (de février à avril), à l’image de l’arbre du premier plan, sur la droite de la photo ;
• Les cyclones causent parfois d’importants dégâts dans la végétation, cassant des branches, arrachant des arbres, modifiant in fine la place des arbres dans la structure des paysages de Guadeloupe, comme sur la gauche de la photo ;
• Le type et le niveau d’entretien engagé pour contenir le développement rapide des herbes sur les accotements routiers par exemple, dicte le cadrage des vues, les hautes herbes pouvant vite obturer tout ou partie du champ visuel.
Le passage du cyclone Maria sur les Petites Antilles, dans la nuit du 18 au 19 septembre 2017, a durement frappé l’île de la Dominique. La Guadeloupe a été moins directement impactée, mais le cyclone, de catégorie 5, a tout de même entraîné des dégâts considérables sur les espaces naturels du Sud Basse-Terre. Les arbres ont perdu en quelques heures quasiment l’intégralité de leur feuillage, à l’origine de paysages dénudés sur les pentes boisées des Monts Caraïbes comme ailleurs à Trois-Rivières par exemple. Nettement visibles sur la photo d’octobre 2017, ces dégâts ont ensuite été progressivement gommés, la végétation puisant dans ses réserves durant les mois suivant pour reverdir à nouveau. On devine néanmoins les stigmates du cyclone au niveau de la silhouette des crêtes forestières des Monts Caraïbes, autrefois « moutonnantes » alors qu’on y distingue aujourd’hui encore la ramure clairsemée de certains arbres.
Emmanuel BRIANT,
paysagiste
avril 2020