Point de vue n° 022
Deshaies, Plage du Bourg, Anse Deshaies (97126)
Point de vue historique
Mots clés
Unité paysagère
Reliefs boisés de la Côte Caraïbe
Typologies spatiales
Reliefs et massifs forestiers, Espaces urbains, Espaces littoraux
Thématiques
Reconquête et dévitalisation des centres-bourgs, Sites emblématiques et remarquables, Dynamiques de l’interface littorale
Analyse paysagère
Permanence des pratiques
Comparé à un cliché plus ancien, ce point de vue de la plage de Deshaies a bien changé : les barques des premiers plans ont cédé la place aux constructions. Plus dense, enchevêtré, le bâti s’est rapproché de la mer, entamant le morne. Un ponton s’avance sur l’eau, le cimetière apparait. De rares bateaux subsistent, sans filet de pêcheur.
Les baigneurs, les flotteurs colorés sur l’eau témoignent de la permanence des pratiques en ce lieu. Activité de pêche ou de restauration côtoient la baignade, bien que celle-ci semble confidentielle. L’avancée des constructions sur l’eau, aux dépends des cocotiers, modifie substantiellement la perception visuelle de ce cadrage. Serait-ce la conséquence d’un épisode cyclonique ? La disparition de ce plan végétal et de la mise en perspective de ses verticales enlève de la profondeur à ce cadrage. La plage est privée d’ombre. Tous les éléments visibles se trouvent également exposés la même lumière franche et directe. Les courbes du relief et du rivage prennent d’autant plus de force, visuellement.
Comment faut-il, à l’avenir, imaginer la relation des bourgs au bord de mer ?
Aline HANNOUZ,
architecte conseil de l’Etat (ACE)
décembre 2017
Un village touristique face à l’érosion littorale
Le bourg de Deshaies a des allures de petit village lové au cœur d’une baie magnifique, fermée au Nord par le Gros Morne. Site Classé depuis 1980, c’est un paysage patrimonial et touristique majeur de l’archipel. Avec le secteur de Bouillante / Malendure, c’est un des deux moteurs de l’écotourisme en Côte Sous-le-Vent. Ce que le visiteur vient chercher à Deshaies, c’est l’authenticité du bourg qui a su garder une échelle humaine et une ambiance accueillante, avec ses petites rues soignées et ses nombreux restaurants, presque tous positionnés en front de mer, quasiment les pieds dans l’eau.
Il faut dire que l’érosion littorale les y aide bien ! L’impression qu’on a en comparant la photographie historique et la série récente est confirmée par le BRGM qui a mesuré un recul du trait de côte d’environ 20 m entre 1956 et 2004 sur la plage du bourg de Deshaies. La succession des épisodes de forte houle participe activement à ce phénomène d’érosion littorale, emportant avec elle les cocotiers de la plage. Ainsi, les restaurants, qui ont remplacé les petites maisons de ville de la rue principale, n’ont pas beaucoup gagné sur la plage : c’est surtout elle qui a reculé au point, désormais, de réduire nettement le passage sur le sable au-devant des constructions. Il en résulte une sorte de privatisation, de fait, de certaines portions de plage, mais qui est davantage subie que voulue a priori.
La plage du bourg de Deshaies est restée une plage vivante et familiale, loin des fortes affluences de la plage de Grande Anse, toute proche. Les enfants continuent à jouer dans les eaux calmes de la baie pendant que les plus grands partent en expédition sous-marine ou en paddle, ou profitent simplement du coucher de soleil derrière les mâts des bateaux de plaisance amarrés dans l’anse. Certes, les activités de pêche ont été déplacées vers le port construit plus au Sud et les embarcations sont rares désormais sur le sable, mais les pêcheurs ont gardé l’habitude de se retrouver sur la plage du bourg en fin de journée, côtoyant, dans une ambiance chaleureuse, les familles et les touristes venus profiter des beautés du site.
Emmanuel BRIANT,
paysagiste
mai 2020