Point de vue n° 014
Capesterre-Belle-Eau, Hauteurs de Marquisat, D3 (97130)
Mots clés
Unité paysagère
Plan incliné de la Capesterre
Typologies spatiales
Reliefs et massifs forestiers, Espaces ruraux
Thématiques
Dynamiques de l’interface périurbaine, Dynamique des espaces naturels
Intentions photographiques
Cette vue paysagère met en perspective, depuis la plaine, le relief surplombant de l'île que seuls annoncent quelques mornes descendus en éclaireurs.
(Sylvain DUFFARD, septembre 2016)
Analyse paysagère
Alternance dans le règne de la banane
De Sainte-Marie à Saint-Sauveur, l’arrière-pays de Capesterre Belle-Eau a toujours été un vaste bassin agricole depuis l’installation des colons français en Basse-Terre en 1635. Quand, en 1650, les deux grands « Seigneurs-Propriétaires » se partagent les terres cultivées de l’île, Boisseret s’installe à la Madeleine (Baillif) tandis que Houël fonde une puissante habitation à Sainte-Marie. S’octroyant le titre de marquis, il en fait un « marquisat », nom qui est resté ensuite à l’usine centrale de Capesterre et à plusieurs quartiers de la commune.
Le terroir de Capesterre est propice aux grandes cultures. Le relief, en plan incliné, est certes pentu mais régulier, sans grand obstacle. Aujourd’hui encore le regard y porte loin, s’arrêtant sur le relief isolé des Petites Mamelles et sur les hauts sommets du massif de la Basse-Terre en arrière-plan, souvent nimbés de nuages.
C’est une terre historique de la canne à sucre, première des grandes cultures de Guadeloupe. Mais à partir des années 1930, à la suite des dégâts considérables du cyclone de 1928 dans les plantations de café et de cacao du Sud Basse-Terre, la culture de la banane d’exportation se développe sur l’île. Le climat de Capesterre y est propice et les bananeraies deviennent vite le motif identitaire des paysages agricoles de la région. C’est encore de nos jours la principale production agricole d’exportation de la Guadeloupe, en tonnage comme en valeur.
Mais alors, pourquoi n’y-a-il plus de bananiers sur la parcelle du premier plan, sur la photo de 2018 ? Un signe de la déprise agricole ? Pas forcément. Depuis les années 2000, les producteurs de bananes de Guadeloupe et de Martinique ont engagé une modification profonde de leurs systèmes d’exploitation afin de réduire l’usage des produits phytosanitaires. Parmi les nouvelles pratiques culturales, on retrouve le principe de la rotation des cultures, avec une courte période de jachère mais aussi un cycle de cannes à sucre et parfois un cycle de cultures maraîchères, avant de replanter de nouveaux bananiers. C’est probablement ce qui se passe ici, sur la parcelle photographiée au premier plan du vaste plan incliné agricole de Marquisat.
Emmanuel BRIANT,
paysagiste
mai 2020