Point de vue n° 065
Saint-François, Anse du Mancenillier (97118)
Point de vue mer
Mots clés
Unité paysagère
Plateaux de l'est Grande-Terre
Typologies spatiales
Espaces littoraux
Thématiques
Dynamiques de l’interface littorale
Intentions photographiques
(point de vue non reconduit en juillet 2021 pour raisons techniques)
Analyse paysagère
Le paradis sur Terre … jusqu’à quand ?
La côte n’a pas, par essence, une vocation touristique. Les spécialistes du tourisme parlent d’ailleurs d’invention des lieux touristiques, c’est-à-dire de la construction par le discours et l’image d’un nouvel usage d’un lieu existant. Cela renvoie à la fois à un détournement, à une subversion de l’utilisation initiale de l’espace, à de nouvelles pratiques collectives et individuelles d’appropriation qui façonnent une nouvelle identité territoriale.
Pourtant, l’anse du Mancenillier devrait être repoussante au vu de son qualificatif : le mancenillier est un arbre très toxique que les premiers colons surnommèrent « arbre de la mort ». Or, cette vue de la résidence le Hamac à Saint-François montre une image que d’aucun qualifierait d’idyllique : une maison cossue en bord de mer « les pieds dans l’eau ».
Mais derrière cette carte postale se cachent des dysfonctionnements : le sentier du littoral qui s’étire de Pointe-à-Pitre au Moule en passant par Saint-François est quelque peu malmené devant la résidence le Hamac. Certes en théorie le promeneur peut passer, d’autant que les résidents ont rechargé en sable la plage en 2017 qui peu à peu disparaissait devant la puissante houle, mais le sentiment de ne pas être le bienvenu est latent. Le propriétaire de la villa onéreuse en arrière-plan doit estimer inconsciemment (ou consciemment ?) que pour le prix de son investissement, la plage est devenue « sa » plage…
Un tel aménagement est-il objectivement pertinent ? Quelle est sa durabilité au bord de l’eau, face à l’érosion littorale, à la montée des eaux et aux aléas naturels (cyclone et son cortège de phénomènes : houle cyclonique, marée de tempête) ? Quelle logique doit primer à l’avenir : le plaisir immédiat de jouir de son pouvoir d’achat ou le respect de l’environnement bénéfique pour l’humain sur le long terme ?
Cette question n’est pas spécifique à la Guadeloupe mais elle est récurrente à tous les lieux dans le monde qui sont synonymes de farniente (a minima la trilogie plage, soleil, mer) pour les riches habitants du monde occidental vivant en climat tempéré.
Jean-Christophe ROBIN,
urbaniste
avril 2020